31 janvier 2014

Les enjeux de la neutralité du Web

Mon collègue m'a fait signer une pétition sur la mise en péril de la neutralité du Web, en me disant "tiens, tu devrais signé cette pétition, c'est effarant ce qu'il y a dedans !! Tu dois certainement connaître vu que tu es très au fait de ce genre de choses (passage de brosse à reluire)..." Effectivement cette pétition n'avait rien d'inconnu en ce qui me concernait. Je savais que ce genre de projet était dans les tuyaux mais de là... Je ne pensais pas que ça arriverait aussi vite...
Tout de suite, il me vient une citation de Churchill "Le mal ne vaincra jamais, à moins que les hommes de bien ne fassent rien" et là, c'est un peu le temps d'agir. Agir oui, encore faut-il le faire en connaissance de cause. 

Pour commencer...
La neutralité du web part d'un principe très simple : les informations qui circulent sur le réseaux sont constitués de paquets élémentaires (packets en anglais). Dans le concept de neutralité du web, chaque paquet d'information est traité de façon quasi-égalitaire par les différents opérateurs techniques (FAI, plateforme, hébergeurs, etc...). Cela veut dire que les paquets ne subissent aucun traitement, aucune altération particulière de la part de ces opérateurs. 

Un petit exemple de neutralité
Prenons un exemple, je surfe sur Youtube. Des paquets étiquetés "vidéo Youtube" arrivent sur mon PC pour me faire visionner ma vidéo. Dans la neutralité, des paquets étiquetés "vidéo Yahoo" sont censés arrivés à peu près en même temps, si les hébergeurs se situent au même endroit (dans la réalité, Youtube n'a pas ses vidéos hébergées au même endroit que celles de Yahoo), en utilisant les mêmes canaux. Il en va de même pour le texte et les images et je pense que vous aurez compris. 

Pourquoi la neutralité ?
C'est assez simples à comprendre. Les enjeux de la neutralité visent à garantir à quiconque, quelque soit l'endroit où il se trouve sur terre dans la limite des capacités des infrastructures disponibles,  de pouvoir se connecter à Internet et ce sans restriction et sans limite. De plus, il faut savoir que l'accès à Internet est maintenant reconnu dans le droit français, comme étant un droit élémentaire au même titre que l'accès à l'électricité ou l'eau potable. C'est malheureusement pas le cas dans tout les pays (RSF publie annuellement un compte-rendu des pays ennemis d'Internet et la liberté d'expression). Mais c'est un autre sujet, bien qu'intrinsèquement il y soit lié.
C'est également dans cette neutralité que le Web et ses nombreux sites sont nés. Sans cette fameuse neutralité, Google n'aurait peut être jamais traversé l'Atlantique et n'aurait jamais connu le succès escompté à l'intérieur de nos frontières. Et pourtant...

Le sujet de la pétition
La pétition que j'ai signée, est un document faisant état d'une menace réelle et avérée sur le principe de neutralité du web. Elle va prendre la forme d'un accord signé entre les États-Unis, l'Europe et certains grands opérateurs techniques afin de les autoriser à pouvoir filtrer les contenus, favoriser des contenus plus que d'autres, pire de censurer et donc d'empêcher la transmission d'information (ce qui constitue une entrave à la liberté d'information). Il s'agit également de favoriser un opérateur en particulier au détriment de la concurrence. 
Il finirait par y avoir un internet à deux vitesse : un internet où ceux qui payent auront un accès plein et entier et un internet plus modeste où seuls des contenus autorisés par votre opérateur vous seront permis d'accéder. 
En cela, la neutralité constitue un gage d'égalité sociale sur le vaste territoire numérique qu'est Internet. 

La neutralité attaquée de toute part. 
Déjà on voit des offres spécifiant 5Go + "Youtube illimité". C'est décemment une atteinte à la neutralité, en voici l'explication. 
Le service de vidéo de la firme de Mountain View "Youtube" est utilisable sans limite alors que le service de vidéo "Dailymotion" est limité au forfait de données. L'opérateur pour cela effectue bien un comptage des paquets "Youtube" versus "Dailymotion". On a bien une différence de traitement des paquets. Cette offre paraît donc anodine mais dans les faits, ça l'est beaucoup moins. 
Mais ce filtrage n'en est pas à ses balbutiements, déjà dans les débats de la mise en place de la future HADOPI, une technique appelée DPI (deep packet inspection) avait été évoquée. Cette méthode visé à inspecter (vous vous en doutiez) en profondeur l'origine des paquets transitant sur le net. De là, on aurait pu dire si le paquet était un paquet lié à une activité de partage illégal ou non. D'ailleurs je me demande si cette méthode n'est quand même pas utilisée pour surveiller les flux (bonjour la parano !). 
A l'assemblée nationale, des députés comme Lionel Tardy ou Alain Suguenot s'étaient élevés contre une telle méthode qui fut finalement rejetée comme moyen de contrôle.

Les alternatives
L'association-phare de lutte pour la neutralité en France est "la quadrature du net" avec son président Jeremy Zimmerman montent régulièrement au créneau afin de dénoncer les menaces qui planent sur le net français, et in extenso dans le monde. 
Régulièrement dans les médias, il intervient pour informer sur les dérives et plus. 
De manière plus générale, il devient important que les gens puissent être informés sur les menaces qui planent, puissent être également conscient de la chance qu'ils ont d'avoir un internet libre. D'où aussi la nécessité de signer cette pétition. 

pour continuer sur le sujet :
Un article du nouvel Obs sur la neutralité




22 janvier 2014

Les problèmes de l'Internet des objets

 Cela faisait longtemps que je n'avais pas poster sur ce blog. Et voilà un vrai sujet de fond. 

L'Internet des objets, qu'est ce que c'est ?
L'Internet des objets est l'espace d'Internet qui est dédié aux objets communicants entre eux et y ayant accès. Ces objets, on en a déjà en notre possession comme les smartphones ou les montres connectées. Mais le concept va bien plus loin : il s'agit d'appareils plus ou moins autonomes qui se connectent seul à Internet. Par exemple, les caméras de surveillance en connection constante et qui lance un email quand une activité est détectée. Dans le futur (pas si lointain), les frigidaires, les fours, l'électroménager en général seront capables d'aller sur Internet pour s'auto-commander des recharges ou des sacs pour aspirateur. Les pèse-personnes pourront communiquer avec une base de données  de diététique pour donner des conseils de nutrition ou bien faire des statistiques sur l'évolution de l'IMC des individus d'une famille. Déjà les téléviseurs vont chercher les programmes télé sur Internet. Tous ces appareils vont générer un trafic internet sans cesse plus important. On parle généralement d'un point d'inflexion ou le trafic des machines sera supérieur à celui générer par les humains. 

Et c'est grave ?
En soit, ce point n'est pas dramatique, mais il signera le commencement de la domination des machines dans notre quotidien.
A cela, il faut voir plusieurs problématiques.
① une problématique d'infrastructures
En effet, avec un trafic grandissant, les lignes classiques (en cuivre) ne suffiront peut-être plus pour accéder tranquillement au Net. Dis plus basiquement, la grosseur des tuyaux d'aujourd'hui ne suffiront plus pour pouvoir surfer dans de bonnes conditions. On peut d'ailleurs se demander si les offres triple/quadruple play des FAI seront encore en mesure de fonctionner correctement (en tout cas j'émets de sérieuses réserves sur les ADSL classiques)
 où sont stockées les données échangées ? Et pour quoi en faire ? 
Ben là c'est un gros mystère qui n'a rien d'agréable. En effet, on peut penser que les données générées par les appareils d'une marque soient "hébergées" dans des datacenters d'une compagnie assurant la prestation de la conservation des données. Tout de suite, on pense à Google ou Microsoft et leurs clouds, et je pense qu'il y a un véritable enjeu dans les années à venir. Je ne pense pas trop me tromper en disant que ce serait stupide de la part de grandes sociétés de ne pas se saisir de ces mines de renseignements. Tout ce qui est capable de renseigner sur nos habitudes est commercialement précieux. Du coup, tous ces objets agiraient un peu à leurs façons comme des mouchards à la solde de gros consortiums (nous verrons ce sujet dans le troisième point). 
Il faut aussi comprendre que le nombre de données générées va devenir énorme (pour ne pas dire colossal) et facilement dépasser le péta-octet et dans toutes ces données, certaines ne seront d'ailleurs peut être pas pertinentes. Bref, il est question de faire le tri entre ce qu'il "vaut le coup" et ce qu'il "ne vaut pas le coup". 
③ les problèmes d'éthique. 
Collecter des données posera également plusieurs questions:
✼les données générées par les objets et en l'occurrence leurs propriétaires en sont ils toujours les détenteurs officiels ? Pourront-ils en jouir comme bon leur semble ?
✼où s'arrête la sphère privée et où commence la sphère "publique", l'environnement des grandes sociétés ?
✼devra-t-on (ou pourra-t-on) collecter toutes les infos ou seulement une partie autorisable (statuant sur des données incollectables, réellement privées) ?
✼sera-t-on certain que la collecte des données ne concerne que des données clairement (et contractuellement) identifiées et pas plus ?
✼qui pourra garantir que ces données ne seront (ou ne pourront) pas être interceptées (ou utilisées) par un organisme tiers (hacker, service de renseignement, organisme gouvernemental) au dépens (ou à l'insu) des personnes qui en sont à l'origine ?
Cette dernière question pose les bases d'un quatrième axe de réflexion. 
④ quid du piratage
Qui dit connexion au Net, dit piratage et en fait rien ne laisse présager que les choses changeront. Déjà un frigidaire connecté s'est déjà fait hacké... No comment ! Et les dernières affaires de la NSA viennent quelque peu conforter cette idée. 

Pour conclure
Outre l'augmentation constante du trafic, on voit clairement que la problématique est loin d'être simple et fait intervenir plusieurs notions (droit, propriété intellectuelle, sphère privée). Par contre, ce qui est certain, c'est que cet Internet des objets connectés verra apparaître de nouveaux acteurs tant au niveau infrastructure (réseau et stockage), que hardware (matériel) ou bien software (application mobile ou PC). À ne pas s'y tromper, pourquoi pensez-vous que certains grands acteurs de la Silicon Valley rachete des start-up qui développent des solutions connectées (le dernier cas en date de Google qui rachète NEST) ? Car ce qu'elles ne pourront pas concevoir elles-mêmes, elles devront l'acquérir via ces dernières, sous peine de perdre une certaine avance en terme de part de marché. 

Tendances sur les sjuets HADOPI et LOPPSI